Ambérieu-Evian
à bord d'un train de fret
Ambérieu-Evian à bord d'un train de fret
Transcription :
Salut Annemasse ! 61505 arrêté au carré 881.
Attends, j'ai un problème justement, je suis en train de regarder ce qui se passe, je te rappel dès que c'est bon pour moi.
Résumé de l'épisode précédent. La semaine dernière, j'ai rencontré Alexandre à l'agence Régiorail d'Ambérieu-en-Bugey et assisté à la préparation courante et à la mise en tête de la locomotive sur un train de wagons vides destinés à être remonté à l'usine d'embouteillage des eaux d'Évian.
Nous sommes maintenant fin prêts. Alexandre a demandé à SNCF Réseau de pouvoir accéder aux voies principales et nous allons pouvoir faire route vers la Haute-Savoie dès que l'itinéraire de sortie du faisceau réception sera tracé devant nous et que l'aiguilleur du poste trois d'Ambérieu nous aura ouvert la voie.
Pas mal de choses intéressantes nous attendent sur ce parcours, d'abord, un passage en IPCS, c'est-à-dire à contre-sens, qui va arriver assez vite. Puis un changement de tension dans la caténaire, mais aussi une traversée de la gare d'Annemasse, quelques jours seulement après la mise en service du dispositif « Deux trains sur une même voie ». Vous êtes prêts ? Alors bonjour et bienvenue dans Aiguillages !
Donc j'ai l'autorisation de mise en mouvement.
Alexandre vient d'obtenir son autorisation de mise en mouvement. Le temps qu'il termine sa manœuvre de sortie du faisceau et qu'il ait dégagé les aiguilles, et je lui redonne la parole dans quelques instants. Nous sommes en effet toujours dans une marche restrictive qui n'est plus une marche en manœuvre, mais une marche à vue, jusqu'au premier signal de cantonnement. Sa vitesse est donc limitée à 30 kilomètres heure. Ensuite, la même limitation de vitesse s'appliquera pour le franchissement des aiguilles, puis la vitesse limite sera relevée à 100 kilomètres heure jusqu'à la gare de Saint-Rambert-en-Bugey. La longueur du train étant de 600 mètres, Alexandre devra compter six bornes hectométriques pour s'assurer de bien avoir dégagé les aiguilles. À force de pratiquer la ligne, il a fini par se créer des repères visuels, à proximité immédiate de la voie, beaucoup plus facile à trouver, surtout de nuit, quand la végétation a poussé ou quand le temps n'est pas au beau fixe comme aujourd'hui. Le rail étant bien mouillé dans son effort pour décoller le train, la locomotive patine un peu, l'aiguille de l'indicateur de vitesse qui n'arrête pas de bouger et l'indice d'essieux qui patinent. Dans cette situation, la seule possibilité est de réduire l'effort de traction en attendant que les roues ré-adhèrent correctement. Sabler sinon, mais au passage des aiguilles, cela ne doit être fait qu'en dernier recours, sans quoi il faudra qu'un agent vienne enlever le sable qui pourrait gêner le bon fonctionnement des appareils de voie. Encore 600 mètres à faire à 30 kilomètres heure maximum. Ici, le point de repère d'Alexandre est un petit chemin en gravier qui arrive le long de la voie. Un accès pour le personnel de l'INFRA quand il doit venir travailler sur cette partie de la ligne. Et voilà le petit chemin de gravier. Je passe donc le relais à Alexandre pour la suite du commentaire. Généralement, le but, quand on est limité à une certaine vitesse, c'est de l'atteindre le plus vite possible. Comme ça, on n'engage pas trop les aiguilles, les machins comme ça. Ils peuvent faire passer le train rapidement sur les voies, autant derrière que sur les voies qu'on coupe éventuellement.
Mais là, aujourd'hui, ça ne va pas être bien brillant au vu de la faible adhérence. Normalement, je serai à 100 kilomètres heure au bout de la ligne droite là-bas, ce qui fait à peu près trois kilomètres pour une mise en vitesse. C'est pas excellent, mais ça pourrait être pire. La, de toutes façons, tu ne peux pas faire bien grand-chose d'autre que d'attendre que ça réagisse, que ça monte.
La, je suis au maximum des capacités de l'engin.
Et là, si tu veux même, je connais tellement bien la ligne que je vais pouvoir m'aider d'un petit ... d'une légère redescente à un moment donné.
Régulation pour le 61505 !
Train 61505 je t'écoute, régulateur ! Bonjour !
Bonjour conducteur. Je me permets de t'appeler pour t'aviser que tu vas passer à contresens entre La Burbanche et Virieu, pour des vérifications de travaux à toi !
Allez bien reçu. Passage à contresens entre du coup La Burbanche et Virieu-le-Grand pour vérification de travaux. Est-ce que tu peux développer s'il te plaît ? Oui, en fait, l'équipement a fait des travaux. Ils doivent vérifier une aiguille pour le passage à contre-sens. Donc comme tu es le premier train qui passe, ça tombe sur toi malgré ton retard. Je suis désolé, à toi !
OK, il y a pas de problème !
De toute façon, le passage à contresens ne change rien en termes de vitesse. Donc il n'y a pas de problème ! Hé bien écoute, impeccable ! Je voulais te donner l'information conducteur, je te souhaite une bonne route, une bonne journée ! Terminé !
Je te remercie pour l'information et je te souhaite une bonne journée aussi ! Terminé !
Bon, voilà, la régulation qui m'appelle pour me dire que je passerai à contresens.
Régulation, qui est elle toujours à Ambérieu ?
Elle est à Chambéry la régulation. En fait, à partir d'Ambérieu, on dépend de la régulation Alpes, l'ancienne région de Chambéry, et de l'autre côté d'Ambérieu, quand on part, direction Lyon, là, ce sera la gestion Lyon. Donc, là, ils te préviennent pour que tu ne sois pas surpris, pour que tu puisses anticiper quelque chose ? En réalité, pour moi, ça ne change pas grand-chose, que ce soit en termes de vitesse ou en termes de conduite, et même s'ils ne m'avaient pas avisé, la signalisation m'aurait dit simplement ce que j'allais faire. Comme il n'y a pas de changement de direction, ça ne change pas grand-chose pour moi.
Là, tu vois, juste après le petit pont qu'on vient de passer, c'est une légère descente, du moins, ça monte moins fort, du coup, je peux prendre un peu de vitesse. Oui, ça t'aide à récupérer de la vitesse. Quand tu as une locomotive en pousse, c'est une des situations dans lesquelles tu peux être aidé ? Tout à fait ! Quand on est avec une locomotive en pousse, là, on est déjà à 100 km/h depuis un petit bout de temps.
En fait, le rôle de la machine de pousse, ça va être de soulager les attelages. Donc à chaque fois qu'elle va pouvoir mettre un coup de traction pour aider la machine de tête, elle va le faire. Que ce soit au décollage des trains pour les mises en vitesse pour les reprises de vitesse. C'est-à-dire que si on a une transition, par exemple à Culoz, le passage en gare se fait à 80 kilomètres heure, ensuite, une fois qu'on a dégagé les 80 kilomètres heure, on monte à 100 kilomètres heure. Là, la machine de pousse aide. Alors qu'en réalité, la machine de tête pourrait très bien arriver toute seule. Mais le principe fait que la machine de pousse doit aider du moment qu'elle le peut. Donc, là, ça ne sert plus à rien que j'atteigne les 100 kilomètres heure puisque dans trois kilomètres à peu près, je serai limité à 90.
Donc ça, c'est aussi la connaissance de ligne qui fait que tu anticipes et que de toutes façons, ce n'est pas la peine … Étant donné que ça monte, je n'ai pas besoin de tractionner bien fort. Et si j'étais à 100 kilomètres heure, une fois que j'arrive sous le petit pont, là sous lequel on va arriver, j'ai juste à couper la traction et je suis à 90 kilomètres heure dans la transition de vitesse.
Voilà, ça, c'est mon point de repère. Je coupe la traction ici à 100 kilomètres heure et deux kilomètres plus loin, je suis à 90, voire même en dessous, donc on est bon ! Est-ce que bien qu'on soit sur l'électrique et pas sur du diesel ou peut être, c'est plus sensible ? Est-ce que vous pratiquez l'éco-conduite ? On pratique l'éco-conduite et étant donné qu'on a conduit des machines diesels qui ne sont pas équipées du freinage rhéostatique, on connaît même encore mieux les lignes et on arrive à mieux anticiper certaines choses. C'est-à-dire que des conducteurs qui ont l'habitude de conduire sur des machines électriques vont utiliser le freinage électrique en permanence, ou du moins, beaucoup plus souvent que nous. Je te montrerai un truc un peu plus loin pendant huit kilomètres, je vais toucher à rien du tout et le train va conserver sa vitesse pour rouler sur l'aire, là où des conducteurs utiliseront le frein électrique et où la traction pourra gagner quelques kilomètres heure, là où ça ne sert pas forcément à quelque chose. Du coup, la transition de vitesse se fait juste au niveau du bâtiment voyageurs de la gare. Tu as une indication pour ça ? Pas du tout ! C'est repris au document de la ligne. Je sais qu'à partir d'ici je passe de 100 à 90. Comme c'est pas repris sur le terrain, si je ne fais pas attention, le KVB me rattrape et il m'arrête. Ça, c'est un TIV 90 qu'on appelle mobile étant donné qu'il est effacé, ça veut dire que je continue sur ma voie. S'il avait été présenté, je serais rentré sur IPCS, c'est la situation que l'on va rencontrer plus loin. Du coup, l'indication est reportée sur le signal là, la barre blanche qu'on voit au-dessus, c'est le TIV 90 de rappel qui est effacé. L'exécution 90 kilomètre heure pour les trains qui roulent plus vite se fera au niveau de l'aiguille, on voit un chevron pointant vers là-bas.
Là, ça roule jusqu'à combien pour les trains de voyageurs ? Euh, il me semble que c'est 110 kilomètres/heure maximum sur cette portion. C'est pas forcément en ligne où les trains roulent vite, mais c'est assimilé à une ligne de montagne. On le verra un peu plus loin. Ça fait un bon passage entre les montagnes.
On voit déjà qu'on est quand même bien au fond d'une vallée, là, et qu'il y a quand même, ça serpente pas mal aussi.
C'est ça ! Il n'y a pas de lignes droites.
Non !
Là, du coup, on va arriver à la gare de Tenay-Hauteville avec son ancien évitement central qui aujourd'hui n'est plus utilisé. Il y avait la même chose à l'ancienne gare de Roussillon juste après La Burbanche, sauf qu'on verra en y passant que ça a été déposé, la voie centrale a été déposée, du coup, les deux voies s'écartent et se rejoignent en même temps. Et là du coup, vu qu'on arrive en gare, il y a ce qu'on appelle un palier. C'est-à-dire que la montée s'arrête au moins pour le passage en gare, don là, je vais reprendre un petit peu de vitesse, et dès qu'on aura quitté les quais, on va retourner dans la montée à douze pour 1000 une rampe assez forte mine de rien.
Oui, surtout avec ce que tu tires !
Oui, ça, c'est encore faisable, mais oui, on s'en va, on va le sentir, ça va perdre un peu de vitesse. Là je fais exprès d'atteindre quasiment la vitesse limite et dès qu'on arrive dans la courbe, là, ça commence à remonter.
La signalisation, c'est du bloc automatique lumineux ?
Exactement. La plupart du temps, on aura des Blocs Automatiques Lumineux et on aura uniquement la partie entre Culoz et Bellegarde qui sera en Block Automatique à Permissivité Restreinte.
On verra que la qualité de la ligne sera un peu moindre. Là, on a de la jolie traverse béton, biblocs.
Oui, parce que là, on est quand même sur la ligne où on peut croiser potentiellement les Lyon Genève.
C'est ça. Et ça, et puis surtout, c'est l'axe principal pour aller jusqu'au point frontière qui est Modane
Aussi, oui !
A partir du moment où on va quitter l'itinéraire international, on va dire, on va se rendre compte qu'il y aura beaucoup plus de traverses en bois. Le tracé de la ligne sera un peu moins sympathique. Donc, là, on a quitté la route nationale. À partir de là, c'est le point de repère pour dire que ça monte beaucoup moins. On arrive quasiment au sommet. Donc, là, tu vois, je suis en train de regagner un peu de vitesse et à partir du moment où j'arriverais quasiment à 90, je coupe la traction.
Donc, là, tu vois, je passe le sommet de la côte au point kilométrique 74 en marche sur l'aire, c'est-à-dire que la traction est coupée. On a une indication ... On perd de la vitesse, mais c'est pas grave puisque du coup on va la regagner dans la première partie de la descente, la vitesse va se stabiliser autour de 80 kilomètres/heure et on va conserver ça pendant à peu près huit kilomètres. Comme notre vitesse maximum, c'est 90 kilomètres/heure. On n'a pas besoin de freiner ou d'accélérer pour pouvoir passer …
Ce rappel-là, c'est 90 pour tout le monde.
Alors du coup, c'est le passage en IPCS.
On va prendre une aiguille en position déviée. Donc on a une vitesse moindre pour les trains qui roulent plus vite. Donc, là, j'ai la répétition en cabine…
Et donc tu es en quelque sorte averti de l'IPCS par le fait qu'il est éclairé. S'il était effacé, tu n'aurais pas de changement, c'est ça ?
Et là, du coup, on va avoir le rappel au-dessus du signal, le TIV 90 de rappel et l'indication Tableau Entrée en Contre Sens. Le TECS qui est la sorte de petite manivelle qui sera au-dessus, qui nous indique qu'à partir de ce point la signalisation sera normalement à droite. Oui, alors qu'actuellement, elle est normalement à gauche. Donc, là, on prend l'aiguille en déviée. Et à partir de maintenant, nous sommes en contresens.
Ce que t'a expliqué la régulation, c'est que tu étais le premier train à emprunter cet itinéraire à contresens ce matin, c'est ça ?
Après des travaux visiblement.
Voilà donc l'équipe qu'on vient de voir vient de terminer son travail.
C'est ça, ils ont œuvré sur les aiguilles. Il y a besoin de vérifications. La plupart du temps, quand il y a une maintenance qui est faite soit sur le matériel, soit sur la voie, on fait des tests derrière pour confirmer que les travaux ont été effectués correctement.
Mais toi, tu a une mission spécifique ? Tu dois rendre compte de quelque chose ?
Du fait que ça n'a pas été demandé, non.
Dans ce sens-là, on voit qu'il y a beaucoup moins de signaux !
C'est flagrant.
Ça veut dire qu'en fait, forcément ça restreint le trafic parce qu'automatiquement, ils peuvent envoyer moins de trains puisqu'il y a moins de cantons.
Dans tous les cas, ça va être restreint parce que j'emprunte un itinéraire qui du coup pourrait être utilisé pour les trains qui arrivent dans l'autre sens.
Mais dans ce sens-là, oui. Le train qui me suit, en gros, il va soit patienter à l'entrée de l'IPCS, soit passé de l'autre côté. Enfin, sur l'autre voie et du coup, il aura plus de facilités à rouler de l'autre côté puisqu'il a plus de signaux.
Potentiellement, l'IPCS peut être utilisée pour doubler un train de fret comme toi ?
Ca arrive très rarement quand même qu'on dépasse la plupart du temps les IPCS à utiliser quand il y a des travaux ou des trucs comme ça, après, quand la ligne de Modane est ouverte, c'est quand même pas mal de trafic sur la ligne. Donc, là, j'ai bien l'indication comme quoi je vais revenir sur ma voie.
Oui ? Tu le vois à quoi ?
Le TIV 90
Ha, c'est juste le TIV 90, il n'y a pas de symbole ou quoi que ce soit là ?
Par contre là, il y a l'indication du changement de voie.
Donc, là, on est sur un tableau de sortie de contresens qui dit me dit qu'à partir de ce point, la signalisation repasse à gauche.
Le fameux signal fermé pour te laisser toi pouvoir revenir.
Ça secoue un petit peu !
Oui !
Et là, on arrive à la gare de Virieu-le-Grand avec l'ancienne ligne qui venait de Pressins qui aujourd'hui a été complètement fermée. Il y a un mur de soutènement qui menace de s'ébouler.
Oui !
Il y avait même un vélo rail ici. Le vélo rail du Bugey qui a été aussi fermé il y a deux ans à cause de ça.
Je pense que c'est même un peu plus que ça !
Du coup, la gare de Virieu-le-Grand, on passe de 90 à 100 kilomètres/heure. Donc, au dégagement, là, je vais pouvoir reprendre la vitesse de 100 kilomètres/heure. La pancarte S, ça, c'est pour le passage dans la tranchée.
Il y en a peu ici ? Je trouve que par rapport à d'autres lignes tu siffles assez peu !
Il y a deux pancartes sur tout le trajet, je crois. C'est assez peu.
Oui, t'as des lignes où c'est quand même beaucoup plus dense que ça !
Pas beaucoup de passages à niveau non plus ?
Il y en a cinq ou six sur la première partie, jusqu'à Culoz, il n'y a pas tant que ça. Après, il y en a beaucoup qui ont été supprimés quand même. Donc, là, on arrive au niveau de l'ancienne gare d'Arc Saint Martin, c'est le sommet de la petite bosse et à partir de là, ça descend jusqu'à Culoz.
Donc, là, avec la vitesse que j'ai, je sais qu'à partir d'ici je reprends que dix kilomètres heure maximum. Je sais que je ne dépasserai pas la vitesse de 100 kilomètres/heure. Ça, c'est valable uniquement avec les trains pour Evian. Quand on montait des trains de gaz à Modane qui faisaient à peu près 1700 tonnes... Beaucoup plus courts, beaucoup plus lourds… Du coup, il prend beaucoup plus de vitesse facilement. Du coup, ça, ce n'était pas vrai. Il fallait que j'aille beaucoup moins vite au début de la pente.
Il faut adapter à la charge. `
On adapte à la composition du train parce que des fois, les trains sont plus courts et du coup, ils prennent plus de vitesse facilement parce qu'ils ne sont pas tirés en arrière dans les courbes, ils ont des réactions... Chaque train est spécifique en termes de freinage, en termes de prise de vitesse, en termes de résistance au vent. Des trains d'autos qui font 700 mètres n'auront pas la même résistance.
Ça dépend comment ils sont quand ils sont chargés ?
Et des fois, le simple fait d'avoir une machine différente joue aussi.
La G1206 qui est un cube qui a une résistance à l'avancement qui est énorme, qui a beaucoup plus de mal à monter en vitesse que la 27000. Déjà, par le fait qu'elle est diesel. Et puis même en vitesse, on sent qu'on est retenu par le vent. Là, tu vois en passant sous le petit pont, si je suis au maximum 96 kilomètres/heure, je sais que je dépasserai pas la vitesse.
C'est plein de petits repères comme ça qui font qu'on est tranquille. Après, on a l'esprit qui est libéré pour regarder tout le reste. Parce que du coup, la mission du conducteur, c'est de conduire son train, mais en même temps, c'est de regarder la voie pour la sécurité, assurer la sécurité de son train, des autres trains... Effectivement, quand on croise les autres trains, on regarde qu'ils n'aient pas d'anomalies qui peuvent mettre en danger notre train, nous voir même les autres ou l'infrastructure en général. C'est pour ça qu'on est tous en relation avec la radio.
Toi, potentiellement, tu peux communiquer avec les autres conducteurs qui sont dans le secteur ?Avec la touche qui est ici. Du coup, je peux communiquer avec tous les conducteurs, tous les postes. Avec la touche qui est ici, c'est le régulateur sous station, donc c'est celui qui s'occupe de toute l'alimentation électrique. Sauf qu'en France c'est pas en fonction, mais à l'avenir ça le sera. Le petit deux, c'est pour tout ce qui est agent de circulation, donc les agents dans les postes d'aiguillage. Le petit un, c'est pour les régulateurs.
D'accord !
Donc tout ça, c'est pour la communication entre nous. Et à partir du moment où on a une urgence, on appuie sur l'alerte radio et l'alerte radio, c'est une communication qui prend le pas sur toutes les autres communications.
Lyon-Genève ?
Pas forcément. Et depuis le changement de service, s'est passé tout AGC sur la ligne.
Ah oui, c'est vrai qu'il y a plus de corail.
Voilà. Donc, là, on arrive à Culoz, à Culoz, la première indication que j'ai ça va être un Tableau Indicateur de Direction à Distance, abrégé TIDD, qui va me donner la direction de gauche pour aller sur Genève. S'il me donnait la direction de droite, j'irais sur Chambéry et Modane. Moi, j'ai bien l'indication gauche. C'est une petite manivelle qui part sur la gauche. Donc c'est une situation qui est conforme. Si ce n'était pas conforme, j'aurais dû m'arrêter au prochain signal pour rectifier le tir. Ensuite, j'ai un TIV 80 qui va me demander de ralentir pour traverser la gare de Culoz, à 80 kilomètres/heure.
Celui-ci, il est répété en cabine, et moi si je veux passer en dessous de 80 kilomètres/heure, je n'ai pas besoin de freiner à la bonne vitesse lors à l'exécution.
Et l'exécution, tu sais toujours où elle est ?
Oui, l'exécution ne change pas. C'est une plaque Z. Si elle est changée de place, je suis averti par les fiches, appelées Artic, qu'on consulte chaque semaine et qui nous informent des changements de signalisation, de la signalisation temporaire... D'autres changements.
Là, au-dessus du signal, il y a ce qu'on appelle un indicateur de direction.
Oui !
On a un feu allumé.
Oui
Cela confirme la première direction géographique en partant de la gauche. Donc, ça confirme ce que disait le TIDD tout à l'heure, on va bien en direction de Genève et, du coup, l'exécution 80 se fait juste là. Je suis à 78 kilomètres/heure sans freiner, on est bon ! C'est parfait. Je vais même remettre de la traction pour conserver la vitesse. Ça secoue un peu sur le passage des aiguilles !
Donc, là, du coup, on a fini la zone à 80 kilomètres/heure, là, je reprends la vitesse à 100 kilomètres/heure, jusqu'à la gare de Seyssel-Corbonod. Une fois que j'aurai passé la gare de Seyssel-Corbonod, je repasse à 90 kilomètres/heure. Et jusqu'à Évian, on ne retrouve plus les 100 kilomètres/heure. Du coup, on va arriver sur la gare de Seyssel-Corbonodu, donc transition de vitesse à 90 kilomètres/heure. Et moi, je sais que quand je coupe la traction à 100 kilomètres/heure avant le signal qui est juste là, je serai à la bonne vitesse en gare. Donc pas besoin de freiner. Encore une fois. Donc la transition de vitesse, elle se fait là, au niveau du bâtiment voyageur. Et comme la ligne n'est pas équipée KVB, il n'y a pas de balises ni rien du tout, donc si je fais une erreur, théoriquement, je ne suis pas rattrapé par le KVB. L'ancienne gare de Perri-Montchanay. À partir de là, il y a juste le changement du canal radio : on était en canal deux, on passe en canal un.
Pourquoi ? C'est un changement simplement de fréquence ou vraiment de supervision ?
Ce n'est pas vraiment ça, c'est plutôt pour l'agent-circulation qu'on va capter.
C'est-à-dire que là, on a Culoz et Bellegarde qui gèrent chacun une partie de la ligne. Et en fait, le changement de gestion correspond au changement de canal. Alors que si je restais sur le même canal et que j'appelais le poste, en fait, j'aurais Culoz et Bellegarde en même temps. C'est ce qui se passe quand je fais un appel de groupe, j'ai les deux postes qui répondent. Donc, en fait, pour permettre de tomber sur le bon poste, à chaque fois que je vais faire un appel de poste, il y a un changement de canal, même si en réalité, tout le monde entend. Là, on va arriver sur les tunnels jumeaux, celui de Génissiat et de Paradis. Ce sont les deux derniers tunnels qu'on a avant Bellegarde. Et pour la conduite économique, à la sortie du dernier tunnel, on se met à 80 kilomètres/heure traction coupée.
Et pourquoi ils s'appellent les tunnels jumeaux ?
Parce qu'ils sont proches ou parce qu'ils font exactement la même longueur à plus ou moins 10 mètres. Le premier est en courbe dans un sens, ligne droite après, le deuxième, il en courbe dans l'autre sens ligne droite après, et il y a, je crois 300 mètres entre les deux. Là, tu sors, tu as le début de courbe et tu vois l'autre.
En effet, ils ne sont pas loin l'un de l'autre.
Tu vois le début en courbe, et puis ligne droite. Tu vois toutes ces chutes d'eau quand tu passes en hiver là-dedans et qu'il gèle !
Ça se transforme en glace ?
Ouais et du coup, le pantographe, on fait bien attention à tout ça !
Sortie du dernier tunnel et du coup là, on a l'annonce baisser panto. On va changer de tension. Historiquement, tout ça, c'était en 1500 volts
Oui, c'est la sortie de Genève, temps tout est passé en 25000 volts.
C'est ça !
Ton baisser le panto tu le fais quand ?
Je le fais en fonction du signal que je vais avoir.
OK !
Soit je le baisse au dernier moment, soit dès qu'il présente le jaune clignotant ou l'avertissement, je coupe tout de suite. On va le voir là, juste sortie de la courbe. Tu vois jaune clignotant, je coupe tout de suite. J'ouvre le disjoncteur, je baisse le pantographe, je surveille la tension et que le pantographe se baisse et vu que j'arrive sur un jaune clignotant...
Le jaune clignotant ouvrant une nouvelle zone dans laquelle Alexandre doit rester concentré sur sa conduite, je reprends donc ici les explications cette pancarte indique que le pantographe doit être baissé à partir de ce point. Celle-ci le changement de tension, on passe de 1500 à 25 000 volts. Alexandre commande la remontée du pantographe correspondant. Dès que la machine retrouve de la tension, ce signal lumineux vert lui donne l'autorisation de refermer le disjoncteur. Nous sommes toujours ici sous jaune clignotant, un signal qui impose d'être en mesure de respecter le suivant qui est annoncé à distance réduite.
Celui-ci est un ralentissement à 30 kilomètres/heure qui concerne la traversée de la gare de Bellegarde. À partir du bout du quai, la voie commence à remonter, ce qu'elle fera jusqu'à l'entrée du tunnel. Nous franchissons un signal de Block Automatique Lumineux affichant la voie libre, je peux donc rendre la parole à Alexandre.
On a le PCT de Bellegarde qui fait la régulation d'une partie de la ligne et puis l'aiguillage en gare. Je crois qu'ils sont deux agents circulation dedans. À partir du panneau 60 Z au dégagement de la longueur du train, on sera limité à 60 kilomètres/heure et ça monte. À la pancarte R, on dégage le 60 kilomètres/heure au niveau de la queue du train, mais du coup, ça nous libère aussi de la zone 60 kilomètres/heure quand j'aurai dégagé avec la longueur du train, je pourrai reprendre à 80 kilomètres/heure. Donc là, pour le moment, 60. Tu vois, il y avait un rail en haut.
Oui !
C'était pour éviter de mettre le tunnel au gabarit 25 000 volt. Il n'y a plus de supports plus rapprochés, mais ça coûte moins cher. Plutôt que de rabaisser le tunnel. Ensuite, du coup, j'arrive a sur le sectionnement à 500 mètres. L'emplacement du sectionnement correspond à l'ancienne section de séparation 1500 volts - 25 000 volts qui était juste à la sortie du viaduc.
Du coup, on est sur le viaduc de Longeray qui fait 50 mètres de haut. Et si tu regardes sur le côté, là, tu vas voir Collonges-Fort-L'Ecluse.
La caténaire a changé là par rapport à ce qu'on avait tout à l'heure, elle est plus simple ?
On est passé sur de la caténaire qu'on appelle trolley, avec juste un petit câble. C'est léger, mais je n'ai jamais eu de problème. Pourtant, on en tire des trains lourds là-dessus.
Je vais aller vérifier mon train ! Je te laisse regarder, tu vas voir, c'est sympa !
Du coup, tu surveilles comme ça de temps en temps l'état de ton train ?
On vérifie qu'il n'y a pas de bâches ouvertes, qu'il n'y a pas de dégagement de fumée, d'étincelles, des trucs comme ça ...
Avertissement !
Nouvelle zone de vigilance pour Alexandre. Le signal de sortie de cette gare, qui n'est plus ouverte aux voyageurs, affiche un carré fermé. Nous allons donc nous arrêter quelques minutes, le temps de croiser un TER. Il s'agit là de notre premier arrêt depuis notre départ depuis Ambérieu. Mais nous voici déjà repartis. Quelques kilomètres plus loin, voici sur la droite la ligne allant vers La Roche-sur-Foron et, par extension, Annecy ou Saint-Gervais-les-Bains. Et c'est l'arrivée en gare d'Annemasse qui s'annonce. Le signal est cette fois-ci au rouge clignotant. Il indique une entrée sur un canton occupé et nous impose une vitesse maximale de quinze kilomètres/heure, en marche à vue. Sur notre gauche, l'entrée du tunnel du CEVA dans lequel ce train suisse s'engouffre en changeant de voie pour passer sur celle de droite, puisque c'est exceptionnellement à droite que se font les circulations dans ce tunnel qui conduit vers la gare de Genève Cornavin. Après celle de Rennes au mois de septembre, la gare d'Annemasse a été équipée en décembre du dispositif deux TMV, deux Trains sur une Même Voie, mais sur certaines de celles-ci seulement. Nous allons passer sur l'une des voies concernées, quelques jours à peine après l'inauguration de ce nouveau mode d'exploitation des trains à quai. Mais le signal qui se trouve à la moitié de celui sur lequel nous passons est fermé !
PG Annemasse j'écoute ?
Salut Annemasse ! 61505 arrêté au carré 881.
Attends, j'ai un problème justement, je suis en train de regarder ce qui se passe, je te rappelle dès que c'est bon pour moi.
Aller, ça marche, je te laisse résoudre ton problème.
Le signal s'ouvre et autorise Alexandre à rejoindre le bout du quai.
PGM Annemasse pour 61505 à toi !
Oui, 61505, j'écoute PGA. C'était pour te dire du coup de tenir au courant de comment ça va se passer. Comme tu as pu le voir, ça, c'est décoincé, on a pu ouvrir 881. Donc là, en fait il y a ton train croiseur qui arrive, qui est là dans à peu près une dizaine de minutes et au croisement, ça sera pour toi pour repartir en direction d'Évian. Allez ça marche, je repars dans une dizaine de minutes. Je te remercie pour tout ! Pas de souci, bonne journée à toi ! Terminé !
À toi aussi !
C'est reparti !
Le 30 Z qui nous est rappelé. Et après la dernière aiguille là-bas, il y a une plaque R au sol, ce sera la fin de notre 30 kilomètres/heure et au dégagement de la longueur train, on sera limité à 80 kilomètres/heure quasiment jusqu'à l'arrivée.
Du coup, tu vois sur ces passages à niveau, ils ont mis l'expérimentation des barrières anti-piétons.
Ha, pour pas qu'ils passent dessous !
Ici, ça fait peut-être trois ans qu'il y en a, c'était une expérimentation et là, j'ai vu qu'ils en avaient mis un peu ailleurs, donc ça a du porter ses fruits.
Une fois que la tête du train à passée le kiosque, on va prendre 80 kilomètres/heure. Dès qu'on passe le 30 km/h, la ventilation se met en route. Deuxième pancarte S.
Le sectionnement qui suit, alors l'avantage avec lui, c'est que si le signal est au ralentissement 60, on a juste à couper la traction avec le sectionnement au milieu, on passe tout seul sans tractionner. Derrière, s'il y a une gare avec un croisement, sans tractionner, sans freiner, on y arrive. Là, j'ouvre le disjoncteur, dès qu'on a passé, je referme le disjoncteur et je reprends la traction. Là ça met des messages un peu bizarre. Ca c'était tout ce qui était équipement voyageur. On n'a pas à en tenir compte, même si c'est écrit en rouge et en jaune... C'est pas pour moi. Alors tu vois les remises en puissance, elles se font progressivement pour éviter les a coups. À chaque fois que tu fais une grosse remise en puissance, tous les attelages se détendent. À un moment, ils reviennent. Ça met des à-coups à chaque fois. Là, on va arriver sur Thonon. La gare se passe à 40 kilomètres/heure. Cette fois-ci, il y a une annonce qui avec exécution, on ne se fait pas surprendre. La gare de Thonon. Là le tableau R, c'est pour la fin de la zone 40 dans 600 mètres. On aura à peine le temps de remonter en vitesse qu'on aura le ralentissement 30 pour rentrer chez Évian. Et voilà... On arrive au bout du voyage. Ralentissement 30.
Un dernier signal affichant l'avertissement et nous traversons le viaduc sur la Dranse, de l'autre côté duquel un rappel d'avertissement est présenté, ainsi qu'un tableau G qui signale l'entrée sur les voies de service chez le client. Cette ITE, Installation Terminale embranchée est plutôt bien dotée, elle compte une dizaine de voies de stockage sur lesquelles s'affairent trois locotracteurs qui entrent les wagons par série de deux ou trois à l'intérieur de l'usine où ils sont chargés avant de former les rames prêtes au départ. Le site dispose d'un aiguilleur, ce qui nous évite un arrêt du train avant qu'un agent ne vienne sur place pour prendre le point afin d'autoriser l'entrée. Ici, celle-ci se fait comme dans un faisceau classique. Bien que nous ayons les voies principales, nous sommes toujours sur le réseau ferré national. Le domaine du client commence au-delà du carré violet que nous allons croiser sur la droite. Malheureusement, je ne pourrai pas vous en montrer plus puisque nous n'avons pas eu de nouvelles des demandes d'autorisation de tournage qui ont été adressées au client pour filmer dans ces emprises. Merci à Régiorail qui a permis le tournage de ce reportage. J'ai vu à vos différents commentaires que la première partie est réalisée autour de la préparation courante de la machine et de sa mise en tête de la rame à Ambérieu vous avait beaucoup intéressé, j'espère qu'il en sera de même pour celle-ci. N'hésitez pas à me le dire et à le dire à Alexandre. Si vous aimez ce genre de reportage, je vous signale un autre réalisé dans une tout autre région, puisqu'il s'agissait de celle des Cévennes que je vous propose de voir ou de revoir avant qu'on ne se retrouve, la semaine prochaine ici même pour de nouvelles découvertes ferroviaires.
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