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La rotonde ferroviaire de Chambéry

La rotonde ferroviaire

de Chambéry

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La rotonde ferroviaire de Chambéry

Transcription :

D'accord, elle n'a fini que 9ème au concours du monument préféré des français, organisé par Stéphane Berne, à l'occasion des journées du patrimoine, mais c'est quand même elle qui avait été sélectionnée parmi de très nombreux bâtiments pour représenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, en 2021 et ce n'est déjà pas si mal. La rotonde ferroviaire de Chambéry est un bâtiment exceptionnel, plusieurs fois miraculé, je vous emmène la visiter et je vous raconte pourquoi et comment. Bonjour et bienvenu dans Aiguillages.

Des rotondes comme celle de Chambéry, de nombreuses ont été construites en France, mais celle-ci reste tout de même hors catégorie. C'est la plus grande de toutes, certainement aussi la mieux conservée, mais alors pourquoi un tel édifice a t'il été bâti ici ?

La faute à l'histoire, et aussi à la situation géographique de la ville. Jusqu'en 1860, Chambéry est située en dehors du territoire français, la commune et au-delà la Savoie appartiennent au royaume de Piémont-Sardaigne qui a alors à sa tête, le roi Victor-Emmanuel II, et pour capitale Turin. Sur ce territoire, comme un peu de partout en Europe, les premières grandes lignes de chemins de fer ont commencé à être étudiées et à se développer à partir des années 1830. Pour le royaume de Piémont-Sardaigne, la construction d'une voie ferrée serait l'opportunité de désenclaver la Savoie en la dotant d'un moyen de communication moderne permettant de relier la capitale du Duché à celle du Royaume, en un temps record. A cet effet, la Compagnie du Chemin de Fer Victor-Emmanuel est constituée le 25 mai 1853 et un premier tronçon de ligne est construit entre Aix-les-bains et Saint-Jean de Maurienne. Il s'agit alors d'une voie unique, mais qui constitue les prémices de la future ligne dite de la Maurienne. La gare de Chambéry, est inaugurée en 18956 ? Après le rattachement de la Savoie à la France, les installations ferroviaires qui s'y trouvent tombent dans l'escarcelle du PLM, la Compagnie du Chemin de Fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée. Envisagé de longue date, le percement du tunnel du Fréjus est terminé en 1871.

Si vous comptez bien, cela fait tout juste 150 ans cette année.

A peine la ligne ouverte, les travaux de doublement de la voie commencent. Ils dureront jusqu'en 1903. La gare de Chambéry se retrouve alors à cette époque au centre d'une petite étoile dont les branches permettent de se rendre vers Genève, Annecy, Bourg-Saint-Maurice, Modane, Lyon, Bourg-en-Bresse et au delà Dijon. Elle est située au point kilométrique 137,673 de la ligne de Culoz à Modane et constitue le terminus de celle en provenance de Saint-André le Gaz. Pour autant ses capacités demeurent modestes. Son dépôt ne pouvant par exemple accueillir tout au plus qu'une 10aine de locomotives. Ce sous-dimensionnement de la gare, préoccupe le PLM qui avec le projet d'ouverture de la ligne vers Lyon dans les années 1880 décide de procéder à son ré-aménagement. Le projet prévoit l'agrandissement du bâtiment voyageurs, l'installation d'une marquise ainsi que le redimensionnement de la gare marchandise. Une remise pouvant recevoir une 15 aine de locomotives est alors envisagée, mais ce projet est abandonné en raison de problèmes budgétaires.

Mais le trafic qu'il soit voyageurs ou marchandises continue de croître et cela nécessite d'envisager de nouveau un réaménagement de la gare et de ses annexes.

Ces aménagements sont commencés en 1906. L'ensemble des voies à quai sont couvertes par des halles métalliques, et surtout pour ce qui nous intéresse le plus aujourd'hui, débute cette année là, la construction au nord de la gare, d'une importante rotonde. D'un diamètre de 108 mètres, d'une hauteur de 27 et d'une superficie de 9500 mètres carrés, elle pèse 900 tonnes et va pouvoir abriter jusqu'à 72 locomotives se répartissant sur les 36 voies disposées en étoile, autour du pont tournant central. Ce qui est peut être moins connu, c'est que le sous-sol de Chambéry et des environs est très humide. Cela remonte à une époque très anciennes ou des glaciers étaient en place. Après leur fonte, ils ont laissé derrière eux de vastes espaces marécageux. De nombreux bâtiment de la ville, et la rotonde n'y échappe pas, ont par conséquent été élevés sur des pilotis d'une hauteur de 8 mètres qui en soutiennent les fondations. Des rotondes, le PLM en aura construit pas mal, et notamment dans la région. Citons celles d'Ambérieu, d'Anemasse, de Grenoble, ou encore celle de Veynes, mais de toutes, celle de Chambéry est la plus grande. La plus vaste jamais établie en France. Du coup, sa construction prendra du temps, 4 ans, et elle ne sera achevée qu'en 1910. Son architecture est inspirée de celle des édifices érigés par Gustave Eiffel. Elle se distingue par sa charpente métallique composée de deux parties. Une annulaire, de 27 mètres de diamètre reposant sur 18 piliers de pierre et une coupole de 55 mètres de diamètre soutenue par des piliers métalliques. Ce sera l'une des toutes dernières constructions de ce type, avant que la construction en béton armée ne vienne se substituer aux charpentes métalliques qui auront marqué les débuts du chemin de fer.

Pourtant, la rotonde de Chambéry a bien failli a plusieurs occasions être rayée de la carte

La première menace sérieuse se profile dès les années 20. La ligne Chambéry-Modane fut l'une des toutes premières a être électrifiée, et avec le départ des locomotives à vapeur, le bâtiment a bien failli une première fois être rasé. Finalement, la rotonde sera électrifiée et pourra continuer à abriter des locomotives de la nouvelle génération d'alors. En 1944, comme l'ensemble des installations ferroviaires, elle sera la cible privilégiée des bombardements alliés. Elle ne sera miraculeusement que peu atteinte. Le reste de la ville de Chambéry en revanche, souffrira beaucoup plus de ces opérations qui visaient a compliquer les mouvements des troupes Allemandes sur le territoire français. Sa destruction sera mise à l'ordre du jour dans les années 80, mais sous l'impulsion d'un groupe de cheminots passionnés, elle sera finalement classée monument historique en 1984.

Pour autant, la partie n'était pas encore tout à fait gagnée, le bâtiment ayant énormément souffert avec le temps. De nombreuses pièces et parties de sa structure métallique détériorées par l'âge et la rouille ont du être changées, et pour cela il a fallu retrouver les gestes métiers d'autrefois, notamment pour l'assemblage des éléments par rivetage à chaud comme cela se pratiquait à l'origine.

En 1976, un contrôle de la charpente métallique met en évidence de très graves détériorations liées au défaut d'entretien de la toiture. Les ardoises qui datent de l'après guerre sont devenues poreuses. La pluie s'infiltre de partout et attaque la charpente.

Sur le bureau des responsables de la SNCF de l'époque deux devis. Un pour la démolition, c'est en gros un peu moins de l'équivalent actuel d'1 million d'euros, l'autre pour les réparations : un peu plus de 3 millions et demi d'euros. La question de savoir si la rotonde valait bien la peine de tels égards allait bien sur se poser. Et il y avait bien des chances pour qu'elle soit vite répondue.

C'est bien évidement la démolition qui est décidée. Bien d'autres rotondes par le passé avaient subi le même sort, dont celle de Veynes assez semblable à celle de Chambéry en tout juste un peu plus petit. Mais c'est alors qu'une poignées de cheminots passionnés a pris fait et cause pour le maintien et la restauration de la rotonde et finira par l'emporter en ayant réussi une forte mobilisation médiatique en faveur de sa pérennisation. La rotonde obtient son classement à l'inventaire des monuments historiques, mais n'est pas totalement sauvée pour autant. Une très mauvaise surprise attend les agents d'entretien qui y travaillent. Un matin de 1996, ils découvrent deux mètres carrés de la toiture, tombés sur le toit d'une locomotive en stationnement. La question se pose sérieusement de savoir si la coupole résistera à la pression exercée par la neige qui ne manquera pas de tomber l'hiver suivant. Des travaux urgents doivent être entrepris. On recherche une entreprise de construction métallique maîtrisant la technique du rivetage, et on découvre qu'il n'y en a plus en France. Heureusement, la SNCF dispose encore d'équipes en charge de l'entretien des ponts métalliques sur son réseau, qui ont se savoir faire. C'est l'une d'entre elles qui interviendra sur la rotonde, et la sauvera de nouveau provisoirement. Jusqu'alors, c'est la SNCF qui assume l'intégralité des coûts qui ne cessent de s'accumuler. C'est alors que son directeur régional de l'époque à l'idée d'organiser une grosse opération de communication. La rotonde est vidée de ces locomotives, le courant est coupé, une scène est installée sur le pont tournant. Un concert auxquels sont conviés de nombreux décideurs locaux et nationaux est organisé. L'objectif, réaliser un film pour présenter la rotonde, et l'intérêt de sa préservation. Moins d'une semaine plus tard, des discussions sur la répartition des financements pour y parvenir sont enfin relancées. La ville de Chambéry s'y engage, le Ministère des transports verse une première subvention à la SNCF, la communauté de commune rejoint les premiers contributeurs, et les travaux salvateurs peuvent s'engager. Ils seront totalement achevé en 2011.

En contrepartie de leur engagement financier, les collectivités locales ont demandé que la rotonde puisse être ouverte au public.

Et c'est ainsi qu'est né le Centre d'interprétation de l'architecture et du patrimoine mis en place au du Technicentre de Chambéry : 800 mètres carrés de la rotonde sont ainsi désormais consacrés à à la mise en valeur du patrimoine historique du bâtiment. Des visites sont régulièrement proposées au public pour les journées du patrimoine, mais aussi certains samedi après-midi.

Mais en allant la visiter pour l'une de ces occasions, vous ne pourrez probablement pas profiter du spectacle que vous aller voir maintenant.

La rotonde abrite de nos jours une partie des véhicules conservés par l'Association pour la Préservation du Matériel Ferroviaire Savoyard. Profitant du Salon Savoie Modélisme qui s'est tenu le dernier week-end d'octobre dans l'ancienne capitale du Duché de Savoie, les promoteurs de la revue Rail Miniature Flash avaient organisés sous sa coupole une soirée pour lancer une année de célébration des 60 ans de leur magazine, avec juste avant les petits fours un spectacle concocté par les membres de l'APMFS. La locomotive 2CC2 3402 s'est engagée pour une parade sur le pont tournant de la rotonde. Je peux vous dire que c'est une machine qui fait du bruit, beaucoup de bruit même, ainsi que de belles étincelles au niveau du pantographe et de ses moteurs, elle n'en a pas moins de 12. Sous son châssis 20 roues réparties en 2 essieux porteurs à chacune des extrémités et deux fois 3 essieux moteurs au milieu. Un monstre qui pèse 150 tonnes et qui a tout juste la place de tenir sur le pont tournant de la rotonde. Cette machine qui est la seule qui a été conservée dans sa série a débuté sa carrière du temps du PLM en 1929. Elle aura parcouru plus de 4 millions de km tout au long de sa carrière, avant de prendre sa retraite en 1974.

Si vous avez pu apercevoir du matériel récent sous la rotonde, c'est tout simplement qu'il s'agit d'un établissement toujours en activité de la SNCF qui entretient une 50 aine d'engins moteurs et je rappelle à ceux que cela intéresse que des visites guidées sont organisées très régulièrement sous la rotonde. C'est d'ailleurs l'une des 700 idées de balades à thématiques ferroviaires que vous pourrez retrouvez dans le Guide du Tourisme et des Loisirs Ferroviaire que j'ai écris et que La Vie du Rail a édité, un guide que vous pourrez vous procurer dans toutes les bonnes librairies, ou directement sur le site associé à cette chaîne www.aiguillages.eu. Si vous vous intéressez également au modélisme ferroviaire, je vous donne rendez-vous sur la chaîne Aiguillages Modélisme, sur laquelle je vous propose un nouveau reportage tous les lundis à 18 heures, sinon, notre prochain rendez-vous est ici même jeudi prochain à 18 heures ou j'aurais le plaisir de partager avec vous mes plus récentes découvertes ferroviaires.

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