Le Chemin de Fer du Bocq

(Spontin/Belgique)

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Le Chemin de Fer du Bocq (Spontin/Belgique)

Transcription :

Bonjour et bienvenu dans Aiguillages, on va aller se promener aujourd'hui sur une partie d'une ligne exploitée par l'association Patrimoine Ferroviaire et Tourisme, le Chemin de Fer du Bocq, c'est en Belgique, ça sera d'ailleurs très probablement au vu des circonstances actuelles, une de mes très rares sorties hors des frontières hexagonales pour cette saison d'Aiguillages. La ligne passe pour être l'une des plus belles du pays, avec ses multiples ouvrages d'art, ses gares qui ont conservé leur aspect d'origine et un parcours qui se fait en pleine nature, mais l'intérêt du chemin de fer du Bocq c'est aussi qu'il sert d'écrin pour mettre en scène la plus grande collection de matériel roulant préservés par l'association, une soixantaine d'engins ex SNCB qui ont été sauvés de la ferraille au cours de ces 30 dernières années. Je vous invite à monter à bord de l'un d'entre eux, un autorail qui a été spécialement affrété pour ce reportage.

On se trouve ici à Spontin, le cœur opérationnel du Chemin de fer du Bocq, sur l'ancienne ligne numérotée 128 de la SNCB qui reliait Ciney à Yvoir. Une ligne d'intérêt secondaire dont la construction avait même été envisagée à voie étroite avant d'être finalement réalisée à voie normale.

Les premiers projets concernant l'établissement de cette ligne remontent à 1835, mais elle ne sera inaugurée sur toute sa longueur que le 1er juin 1907. Malgré la présence de plusieurs sites industriels dans la vallée du Bocq a qui il tardait d'être desservis par le train, cette ligne ne fut construite qu'après de très longues tergiversations. Si elle ne mesure qu'une 20 aine de km de long, c'est la topographie des lieux qui a conduit à ces longues hésitations. Sur cette distance, la voie ferrée traverse en effet 15 fois le Bocq, et 5 tunnels, dont celui d'Yvoir dont la longueur dépasse le kilomètre. Fermée au trafic voyageur, dès 1960, la ligne ne verra plus non plus passer de trains de fret à partir de 1983. L'association Patrimoine Ferroviaire et Tourisme, qui a été constituée en 1988 pour acquérir, préserver et remettre en circulation du matériel historique des Chemins de Fer Belges et exploiter une ligne ferroviaire à des fins touristiques s'attache depuis à la remettre en état dans l'espoir de pouvoir la parcourir de nouveau un jour, dans son intégralité.

Les 23 kilomètres ne sont pas encore exploitables, parce-que depuis 22 ans l'association remet en état chaque kilomètre bout à bout de la ligne. Actuellement il faut compter, nous avons 16 km qui sont réellement bien utilisables, on a quelques problèmes du côté de Ciney parce-que là, Infrabel est en train de monter la vitesse de la ligne 162, la ligne qui fait Namur Libramont, et forcément en devant modifier la courbe, on a du se mettre un peu de côté et pour le moment on ne peut pas entrer en gare de Ciney avec notre matériel. Ça va se faire très prochainement à la fin de la saison normalement nous aurons le raccordement qui sera terminé, l'assiette qui sera remise, on pourra entrer avec une voie distincte, à nous, jusqu'à la gare de Ciney. De l'autre côté on est pour le moment bloqué à Bauche, on travaille, on remet ça en ordre et cette année déjà les bénévoles, parce qu'il faut savoir que dans l'association il y a juste une personne qui est employée, tout le reste ce ne sont que des bénévoles et c'est de l'huile de coude bénévole qui fonctionne. Ici, on a nettoyé, déboisé, deux km de voie entre Beauche et Yvoir Carrière, donc on va pouvoir accéder à l'entrée du tunnel d'Yvoir. C'est aussi quelque chose qui est espéré pour la fin de saison ce qui nous permettrait de voir l'avenir et d'espérer entrer assez rapidement en gare d'Yvoir.

Le tunnel qui précède l'entrée en gare d'Yvoir constitue à ce jour le plus gros obstacle que les bénévoles de l'association vont avoir à franchir. Il mesure 1050 mètres de long et son état général suppose la réalisation de quelques travaux avant d'envisager d'y faire circuler des trains. Mais c'est bien en raison de l'intérêt que présente cette ligne pour les passagers qui l'empruntent, que les membres de l'association on jeté leur dévolu dessus.

Ce qui fait que ça c'est fait là, c'est que c'était une ligne libre, exploitable et qui en plus de cela, permettait d'arriver comme tu as pu le voir entre Dorinne et Purnode, sur toute une partie qui est très spectaculaire, qui est très appréciée, encore une fois, je te l'ai déjà dit tantôt, nous sommes selon ce que l'on dit, ce n'est pas du chauvinisme et je ne vais pas crier cocorico, nous sommes la ligne de chemin de fer touristique la plus spectaculaire de Belgique, donc c'est un atout, c'est un plus, plutôt qu'une voie un peu banale, d'avoir une voie comme ça. A ce moment là, la ligne Dinan-Givet n'était pas disponible, autrement il est possible que l'on ait pris Dinan Givet qui était aussi une très très belle ligne.

Celle-ci à le mérite d'offrir un très bel écrin au matériel historique qui y circule, régulièrement, tout au long de la saison, mais aussi de façon plus ponctuelle lors du festival annuel du Chemin de Fer du Bocq. Une partie du matériel roulant est alors rapatrié depuis les sites ou il est entreposé pour le faire circuler ici. Et un safari photo est même organisé pour les amateurs.

L'association a beaucoup de matériel roulant, il faut compter que tu as au total, une 60aine de véhicules, on est en Belgique, la plus grande association et ce qui est remarquable, c'est que à 90% des véhicules, ce sont des véhicules que l'on a racheté à la SNCB, donc à la rigueur, je crois que l'on peut dire que nous sommes l'association qui a restauré, remis en état, le plus de matériel national. Cet autorail, appartient à plusieurs membres, c'est plusieurs membres … c'est un peu la caractéristique de l'association, c'est que pas mal de membres ont investis dans les machines et tout le reste pour permettre à l'association de se développer si tu veux. Cet autorail, il date de 1951, il a été construit par Ragheno à Malines, il a roulé dans la livrée dans laquelle tu le vois, jusque à peu près 1970 et puis par la suite, je te montrerais l'autre autorail qui a la livrée qu'il a adopté. Quand ils ont racheté cet autorail il y a une 20aine d'années, la première chose qu'ils ont fait, c'est le remettre dans la livrée 1960/1970.

Cet autorail et pas mal d'autres engins est garé dans le tunnel qui se trouve à la sortie de la gare de Spontin. Mais malgré ses 501 mètres de long, le problème de place sur le site se fait vite sentir. Sans compter que récupérer un engin particulier pour se livrer à des travaux de maintenance dessus, ou le faire rouler sur la ligne comme nous le faisons aujourd'hui, suppose de nombreuses manœuvres, puisqu'il faut vider le tunnel du matériel qui l'occupe. Et les choses ne vont pas aller en s'arrangeant, car l'association va devoir prochainement libérer les anciens ateliers SNCB de Kinkempois près de Liège. Du matériel qu'elle est de toutes façons assez pressée de récupérer pour mieux les abriter car plusieurs voitures stockées là-bas ont été taguées et des locomotives gravement détériorées. Reste, alors que la place manque à Spontin, qu'une partie du matériel de l'association est stationné à la gare de Dorinne-Durnal dont les voies sont aussi bien occupées, à trouver une solution pour parquer ces engins supplémentaires.

Le but serait d'enfermer le matériel dans le tunnel d'Yvoir, dans le fameux tunnel d'Yvoir, jusqu'au moment ou pourra trouver une autre solution. On a toujours des espoirs … On pensait reprendre Spontin Sources, mais un particulier vient de signer le compromis de vente, on espère … On a deux grands projets, bon, lequel sera réalisé et y en aura t'il un de réalisable ? Réutiliser l'assiette d'une carrière qui est entre Dorinne et Purnode ou alors l'autre projet ce serait un terrain en commun avec Infrabel, tout près de la gare d'Yvoir.

Quelle que soit la solution retenue elle impliquera de nombreuses heures de travail pour l'équipe de bénévoles de Patrimoine Ferroviaire et Tourisme, et aussi probablement de gros investissements que l'association aura a porter sur ces propres deniers. Le PFT ne pouvant compter sur aucune subvention, c'est l'argent encaissé à l'occasion des circulations de ses trains sur la ligne du Bocq, ou sur le réseau ferré national Belge, même si celles-ci ne sont temporairement plus possibles, qui permet de faire avancer ces projets de conservation du patrimoine ferroviaire Belge au prix de très lourds travaux qui doivent être au terme de leur réalisation validés par le SSICF, le Service de Sécurité et d'Interopérabilité des Chemins de Fer. En parallèle des travaux sur le terrain, les actions de conservation et de remise en état de matériels roulants se poursuivent.

Ce qu'il faut savoir c'est que nous venons de lancer un crowd Funding, pour la restauration de 3 locomotives à vapeur. Tu connais, tous les amateurs, toutes les personnes intéressées connaissent les prix de restauration d'une locomotive à vapeur, ça vient que la tuyauterie n'est pas éternelle, que la chaudière est à reconditionner régulièrement, donc nous avons lancé tout dernièrement un crowd funding pour restaurer nos trois locomotives à vapeur. Nous avons ce que l'on appel un Tet25, qui ressemble très fort aux 150 de la SNCF, on a une P8 prussienne, même chose, elles sont circulé en France aussi, et nous avons une plus petite locomotive qui pourrait tourner ici, qui elle n'ira jamais sur le réseau, mais qui pourrait tourner sur la 128.

Ce qui peut surprendre sur cette ligne, c'est que souvent les gares semblent posées au milieu de nulle part, à l'image de celle dite de Dorinne-Durnal qui ne se trouve sur le territoire d'aucune des deux communes qu'elle est sensée desservir.

Elle est dans le petit hameau de de Chancin, c'est un tout petit hameau, rien ne l'indique sur la gare, mais d'un côté de la gare tu as Dorinne et de l'autre côté tu as Durnal. Il faut compter que elle est à peu près à mi-chemin, à 3km de l'un comme à 3 km de l'autre. Rares sont les gares qui sont vraiment au centre village, tu as Spontin qui est centre village, mais c'est quasiment l'exception. Au départ, comme pas mal de lignes de chemins de fer Belges elles étaient destinées au transport de fret. C'est comme ça que les lignes traverses des carrières, mais que les gares sont parfois à 3 km du village, c'est symptomatique, et je pense que si on mettait les gares c'était pour transporter les voyageurs qui allaient travailler dans les carrières, c'était dans ce sens là surtout.

Outre son intérêt économique, la ligne 128 en présentait également un stratégique, c'était une liaison ferroviaire de substitution pour rejoindre la France, sur laquelle les militaires ont longtemps garder un œil. Du reste durant les deux conflits mondiaux, elle fut au cœur de l'histoire

La région a énormément d’anecdotes tenues aux deux conflits. En 14/18, il faut savoir que 92% des bâtiments du village de Spontin on été détruits, c'était dramatique … Pour l'assassinat du commandant Meyer, l'armée allemande à ravager le village de Spontin, et par la suite on a appris qu'en réalité c'était un règlement de compte entre allemands. Donc les gens du coin, accusés de francs-tireurs, de résistants et autre … n'y pouvaient rien. Tu as eu également, le fameux tunnel d'Yvoir, qui fait un km, qui est le plus long de la ligne. Dans ce tunnel, lorsque Hitler descendait vers la France, il s'est arrêté. Le train est resté dans le tunnel, mais comme il se méfiait effectivement des résistants, il n'est pas resté, il est allé dormir à l'hôtel à côté, mais le train est resté dans le tunnel, et même chose, Romel est venu avec un train, qui est resté abrité dans le tunnel d'Yvoir pendant que lui aussi allait dormir à l'hôtel juste à côté.

Et il avait sans doute raison de se méfier des résistants, car ceux-ci ont bel et bien réussi à mener une opération d'envergure vers la fin de la guerre

C'est le fameux tunnel de Spontin, ou le 19 juillet 1944, les résistants avaient réquisitionné une locomotive dans la gare plus haut de Sauvet. Comme l'occupant garait ses rames de voitures voyageurs, et ses wagons, dans les tunnels pour éviter l'aviation alliée, les résistants l'ont su et il s ont mis 15 kilos de dynamite sur un buttoir, 15 kilos d'essence sur le butoir du dernier wagon. Ils ont chauffé la locomotive. D'après les statistiques elle aurait passée la gare de Spontin à 90 à l'heure. Ils l'ont envoyé à fond dans le tunnel, il faut compter à peut près 300 000 litres de carburant a explosé dans le tunnel. Ça aurait brûlé pendant 8 jours dit-on.

Il vous reste encore bien des choses à découvrir sur cette région, et le plus simple pour ça, c'est d'aller sur place, quelques circulations sont encore programmées en 2020, pour le reste, et on l'espère un prochain festival, ce sera en 2021. En attendant à Spontin et sur l'ensemble de la ligne du Bocq les travaux continuent. Si jamais l'envie vous prenait de rejoindre l'association pour contribuer à l'avancée de ses projets, Jean-Pierre ne pourrait que vous encourager à franchir le pas.
Ici, si tu veux, ce que j'apprécie énormément, dans cette association, c'est le souci de respecter le patrimoine, de restaurer le patrimoine, et alors, l'ambiance. L'ambiance est exceptionnelle, il y a ici un esprit de camaraderie, de respect des bénévoles, c'est quelque chose qui n'est malheureusement pas toujours le cas. Il y a ici dans cette association un respect gigantesque des bénévoles qui ont créé une mentalité et une ambiance de travail, superbe.

Je ne peux qu'en témoigner aussi et remercier l'équipe pour son accueil, et vous donner rendez-vous la semaine prochaine, pour de nouvelles aventures sur les rails.

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