Le TGV M
Il arrive !
Le TGV M Il arrive !
Transcription :
Celui que l'on appelait encore récemment le TGV du futur roule enfin ! Alors bon, pas encore en France, mais ça ne saurait tarder. Une première rame a été pour l'heure envoyée en République Tchèque pour y réaliser des essais dynamiques, et a déjà atteint là-bas la vitesse limite de 200 km/h admise sur l'anneau sur lequel elle tourne en rond. D'autres tests à plus grande vitesse seront réalisés dans l'hexagone et devraient commencer dès ce printemps sur la ligne LGV Est. Officiellement rebaptisé TGV M par la SNCF, Avelia Horizon par son constructeur, il constituera la 4ème génération de Trains à Grande Vitesse mise en service dans notre pays, la 5ème produite par Alstom.
Car oui, il en existe une qui n'a jamais roulé en France, je vais vous en reparler. Mais alors pourquoi la lettre M ? En quoi ce nouveau TGV est-il innovant ? Quant pourra t'on monter à bord pour ses premiers voyages commerciaux ? Je réponds à ces questions et à quelques autres encore dans ce nouveau numéro. Bonjour et bienvenu dans Aiguillages !
Le projet de créer une nouvelle génération de TGV à la SNCF est né en 2015. Contrairement aux habitudes de la grande maison, le nouveau prototype n'a pas été étudié en interne avant d'être commandé à un constructeur mais la SNCF a cette fois-ci dès le départ recherché un partenaire pour le développer en lançant un appel d'offre. Celui-ci a été remporté par Alstom. Et c'est ainsi qu'est né le concept d'une nouvelle génération de TGV baptisée Avelia Horizon. Autre grande nouveauté pour la mise au point de ce nouveau matériel, le personnel amené à l'exploiter à commencer par les conducteurs, mais aussi les chefs de train a été associé à sa conception. Un panel de voyageurs a aussi été constitué pour donner son avis sur les sièges et les équipements intérieurs, mais pour l'instant, il n'y a que peu d'informations qui ont filtrées à ce sujet.
L'Avelia Horizon, ou TGV M, que l'on a aussi appelé un temps TGV du futur ou TGV 2020, est la 4ème génération de TGV commandée par la SNCF, la 5 ème produite par Alstom.
Alors récapitulons. La première génération de TGV c'est celle qui est née dans les années 70 et qui a commencé à rouler sur le réseau ferré français à partir de 1981. Il s'agit bien sur du célèbre TGV Sud-Est, apparu sur les rails avec sa couleur orange, conçue comme une rupture avec le vert qui était jusqu'alors la couleur dominante des trains de voyageurs. D'un point de vue technique, ces TGV là étaient limités à la vitesse de 270 km/h. 109 rames ont été construites. La deuxième génération est revenue à une livrée à dominante bleue, plus sage qui s'est peu à peu étendue à l'ensemble des TGV alors en service dans l'hexagone. Il s'agit de celle du TGV Atlantique qui lui peut pousser des pointes jusqu'à 300 km/h et qui a été inauguré en 1989. 105 rames ont été produites. Troisième génération, le TGV Duplex. Sa caractéristique la plus visible, introduire sur les lignes à grande vitesse, des voitures à deux niveaux, une spécificité toute française. 156 rames ont été fabriquées. Il a été introduit sur les rails à partir de 1995.
Pour ce qui est de la 4ème génération, tout dépend de comment on compte. Pour la SNCF, il s'agit du TGV M qui nous intéresse plus particulièrement aujourd'hui, mais pour Alstom, de l'AGV dont je vais tout de même vous dire quelques mots.
L'AGV pour Automotrice à Grande Vitesse, est donc un Train à Grande Vitesse. Il reprend une bonne part des concepts des 3 premières versions de TGV déjà produit par Alstom, mais en diffère quelque peu. Si l'on parle d'automotrice, et non de train, c'est parce que l'AGV n'a pas de locomotive. Dans un TGV classique, les moteurs sont positionnés dans deux motrices qui se trouvent à chacune des extrémités de la rame, un dispositif appelé motorisation concentrée. Ces motrices encadrent 8 ou 10 caisses. 8 dans le cas du TGV Sud-Est, 10 dans celui des TGV Atlantique. On parle de rame articulée parce-que cet ensemble ne peut pas être facilement dissocié comme on le faisait en détachant ou attelant des voitures en fonction des besoins sur des trains classiques. La raison est que celles-ci se partagent un même bogie. L'ensemble des voitures est solidaires, ce qui présente au moins trois intérêts. Le premier en terme de confort, puisque aucun passager ne se trouve plus assis au dessus des roues, on limite le bruit et les vibrations ressenties, le deuxième en terme de sécurité. Une rame ainsi solidarisée à tendance en cas de déraillement à rester droite, tandis que les voitures d'un train classique dans la même situation se mettent en accordéon. Cette vertu a été découverte lors des premiers accidents dont a été victime une rame de TGV lancée à grande vitesse. Le 14 décembre 1992, le TGV Paris-Annecy déraille à 270 km/h au passage dans la gare de Mâcon-Loché en raison d'une défaillance matérielle. Un an plus tard, c'est une rame assurant la liaison Valencienne-Paris qui déraille à 300 km/h dans la Somme, conséquence d'un affaissement de terrain. Dans les deux cas, les rames sont restées dans l'axe de la voie. Troisième intérêt, la réduction de la consommation énergétique. Moins de bogies, c'est moins de résistance à l'avancée. Dans ce dispositif dit à motorisation concentrée, les motrices restent autonomes, c'est à dire qu'elle peuvent être détachées de leurs voiture. Leur caisse repose sur deux bogies. L'un situé à l'avant, l'autre à l'arrière. En cas de besoin, il est possible d'affecter de nouvelles locomotives à une rame, ce qui s'est déjà produit ponctuellement, ou de façon plus globale notamment dans le cadre d'opérations de mi-vie au cours desquelles des ensembles de voitures se sont vues affectées de nouvelles motrices. Mais ça, je vous l'ai expliqué dans la vidéo intitulée TGV : les grandes évolutions du matériel roulant.
Mais revenons aux Automotrices à Grande Vitesse.
Dans une automotrice de type AGV il n'y a pas à proprement parler de motrice, mais seulement deux cabines de conduite à chacune des extrémités du train, et c'est l'ensemble de la rame qui devient solidaire. Des passagers peuvent donc se retrouver juste derrière le conducteur, ce qui n'est pas possible dans les TGV traditionnels. Difficile de changer l'un des éléments d'une automotrice sauf à passer en atelier, mais ce sont là des manipulations longues et complexes à réaliser qui ne font pas partie du quotidien de l'exploitation de ces matériels roulants.
Mais alors s'il n'y a pas de locomotive, ou sont les moteurs ?
Hé bien en fait, un peu de partout, et c'est là que réside l'intérêt de l'approche appelée motorisation répartie. Potentiellement tous les essieux, c'est à dire chaque ensemble de deux roues reliées par un axe transversal peuvent être moteur, mais ce n'est pas une obligation et c'est loin d'être la réalité. En fait, c'est au client final de choisir en fonction de la puissance dont il veut disposer pour permettre à ces véhicules de rouler plus ou moins vite ou de franchir des rampes plus ou moins importantes. Le concept n'est pas nouveau, les Shinkansen japonais, et les ICE Allemand l'exploitaient déjà. Il présente quelques avantages comme celui de réduire la consommation énergétique, ou d'embarquer un plus grand nombre de passagers du moins dans des rames à un seul niveau, car les moteurs et les équipements annexes prenant de la place, ils sont situés pour les premiers au plus près des essieux, mais pour les seconds, dans la caisse, sous l'espace réservé aux passagers. Il faut dès lors que le plancher de celui-ci soit surélevé, ce qui exclut la possibilité de créer un second niveau. Autre atout des rames AGV elles peuvent être livrées et circuler dans différentes configurations de 7 à 11 voitures, et en tranches multiples comprenant de 2 à 3 automotrices.
Curieusement, ce projet d'Alstom n'a pas rencontré un très grand succès commercial.
Ce qui est surprenant, car beaucoup de pays s'intéressaient pour se doter de liaisons à grande vitesse à des trains optant pour la solution de la motorisation répartie. Le constructeur Alstom s'est donc penché sur cette approche, et a mis au point d'un prototype baptisé Pégase, qui fut bien sur présenté en priorité à la SNCF. Ce modèle ne retint néanmoins pas son attention, car contrairement aux autres pays pratiquant la grande vitesse, l'entreprise ferroviaire française préférait privilégier des rames à plus grande capacité et donc à deux niveaux. Le choix d'opter pour des rames de type Duplex pour le renouvellement des TGV Sud-Est et Atlantique s'explique aussi par le souci de conserver une certaine homogénéité dans le parc de matériel roulant, pour en simplifier l'exploitation et la maintenance. Au mieux, la SNCF aurait pu s'intéresser à un AGV à deux niveaux, mais Alstom a renoncé à le développer du fait de trop nombreuses contraintes techniques qui n'ont pas trouvé de solution satisfaisante.
A l'étranger, le seul client qui s'est déclarée intéressée par l'AGV est la société Italienne NTV Nuovo Trasporto Viaggiatori qui en exploite 25 composées de 11 voitures, soit une capacité d'environ 500 passagers sur les liaisons Turin-Naples, Rome-Venise et Turin-Ancône, sous le nom commercial de Italo. Cet échec commercial s'explique par une très grosse concurrence qui existe sur ce type de type de matériels, les constructeurs étant nombreux sur ce marché. Pas mal de compagnies ferroviaires à l'étranger se sont laissées séduire par une technologie concurrente à celle de la grande vitesse à la française, et ont opté pour des trains pendulaires, dont l'intérêt est de pouvoir rouler à grande vitesse mais sur des lignes classiques dont ils épousent les courbes en s'inclinant. Problème cette approche n'est pas très compatible avec celle de la rame articulée que l'on privilégie chez nous. Enfin dernière difficulté, ayant été conçues pour circuler sous 3000 et 25000 volts, se posait le problème de pouvoir installer des transformateurs pour envisager de permettre à ces rames de s'aventurer sous 15000 voire 1500 volts pour les rendre respectivement tri ou quadri-courant et leur permettre ainsi de circuler un peu de partout en Europe, et là, la place a commencé à sérieusement manquer.
Pour se relancer, Alstom a donc mis à l'étude une nouvelle génération de trains à grande vitesse qu'elle a baptisée Avelia.
Sous l'influence de l'Europe qui voyait d'un mauvais œil la pratique de la SNCF consistant à mettre au point en interne le cahier des charges de ses matériels roulants avant de passer commande de leur construction à un industriel le plus souvent français, la donne à donc changé. Pour la mise au point de sa 5ème génération de TGV Alstom a donc dans un premier temps fait cavalier seul, comme il l'avait déjà fait pour l'AGV. L'entreprise développe désormais un catalogue de trains, dans lequel les grandes compagnies ferroviaires peuvent puiser. Pour séduire le client, il faut chercher la meilleure visibilité possible et pour cela la marque Avelia a été créée. Elle couvre une gamme de Trains à Grande et Très Grande Vitesse à un ou deux niveaux, pendulaires ou non, capables de rouler entre 200 et 300 km/h. Voilà qui a le mérite d'être une définition claire.
Dans cette série on trouvel'Avelia Pendolino qui fait partie du catalogue d'Alstom depuis qu'elle a racheté l'entreprise Fiat Pendolino qui l'avait mis au point, et l'Avelia Liberty qui circule aux Etats-Unis.
En effet, Amtrack, l'entreprise publique américaine bien connue a passé en 2016 commande à Alstom d'une nouvelle série de 28 rames pour son Acela Express, un Train à Grande Vitesse qui circule entre Washington et Boston.
Alors attention, quand on parle de Grande Vitesse aux Etats-Unis, ce n'est pas tout à fait la même définition que celle que l'on en donne en Europe.
Non, l'Acela Express roule pour l'essentiel de son parcours sur des voies qui sont également empruntées par des omnibus et des trains de fret, et la seule portion réellement à grande vitesse dépasse à peine la longueur de 50 km, sur une ligne qui en mesure 750. Dans le cahier des charges proposé aux constructeurs ferroviaires pressentis, il y avait d'ailleurs explicitement un ensemble de paragraphes consacrés à la résistance des nouvelles rames à un choc éventuel avec un train de fret. Rassurant. C'est Alstom qui a remporté une nouvelle fois ce marché, et qui fournira le matériel roulant qui a succédé au premier déjà sorti de ses usines. Les trains à grandes vitesses construit pour cette ligne, seront rebaptisés Avelia Liberty
Vous avez compris le principe, un nom commercial générique proposé par le constructeur, et nouveau nom de baptême chez l'exploitant, aller, on joue !
Alors dans la famille Avelia Euroduplex je demande à la SNCF le TGV 2N2.
Gagné ! C'est moi qui rejoue !
Dans la famille Avelia Horizon, je voudrais le TGV M.
Encore gagné !
Alors là, on va s'arrêter un peu plus longuement. Cette dernière version en date du TGV made in France a donc été envisagée au tournant des années 2010. Conformément aux nouvelles règles du jeux édifié par l'Europe, la SNCF a donc lancé un appel d'offre en vue de la recherche d'un partenaire pour la conception d'une nouvelle génération de trains à grande vitesse. Sans grande surprise puisque c'est la seule entreprise a avoir fourni jusqu'alors ce type de matériel roulant dans l'hexagone, Alstom a été retenue pour concevoir et construire ces nouveaux trains. Pour réduire les coûts de conception, l'entreprise ne va pas partir de 0, mais de composants existants dans sa gamme Avelia. Cela donnera naissance à un nouveau produit, baptisé Avelia Horizon. Sans surprise de ce fait, le nez de la première motrice révélé à Belfort en mai 2021, présente un air de famille tout à fait frappant avec celui des Avelia Liberty. Du point de vu de ses autres caractéristiques, l'Avelia Horizon est une rame articulée composée de deux motrices plus courtes de 4 mètres que celles des générations précédente, mais on est bien revenu à une motorisation concentrée, et de 7 à 9 voitures. Il s'agit d'un TGV modulaire, retenez bien cette idée. L'aménagement de chacune des voitures est aussi modulaire. On n'en sait pas encore grand chose si ce n'est que les sièges seront montés sur des rails qui permettront de les déplacer facilement voir d'intercaler d'autres modules comme des espaces pour les bagages. En revanche, la SNCF a renoncé de ce fait à une proposition d'Alstom de pouvoir retourner les sièges pour les mettre toujours dans le sens de la marche, ou constituer des carrés à volonté. Ceux-ci devraient être d'ailleurs moins nombreux que dans les précédentes versions d'aménagement des autres TGV. La capacité de ces nouvelles rames variera de 600 à 740 places. Cette disposition pourra varier facilement en fonction de l'évolution de la demande client. On pourra par exemple rapidement modifier une voiture pour en changer la classe. Un passage en atelier permettra également d'adapter aux besoin la longueur des rames qui pourra être réduit à 7 voitures. On attend avec impatience d'en savoir plus sur la voiture bar, auquel le concept de bar cathédral devrait être appliqué, c'est à dire que sa hauteur sera de deux niveaux. Les personnes en chaise roulante pourront accéder à leur place en toute autonomie. La vitesse de pointe de ces nouveaux TGV sera de 360 km/h, mais ils devraient se contenter de rouler à 320, le gain de temps obtenu à une vitesse supérieure n'étant pas nécessairement rentable, car l'usure du matériel et des voies augmente avec la vitesse.
Le maitre mot de cette nouvelle gamme de TGV étant la modularité, la SNCF a passé commande de ses premiers TGV Horizon à Alstom et les a rebaptisés en interne et pour sa communication extérieure TGV M.
Dans un premier temps, une 100 aine de ces rames bi-courants ont été commandée à Alstom, une option ayant été posée pour une centaine d'autres. L'été dernier, une commande ferme de 15 autres nouvelles rames quadri-courants celles-ci est venue compléter la première. Les livraisons devraient s'étaler sur une dizaine d'années de 2023 à 2033. La première rame est arrivée entre les mains de la SNCF fin 2022 et a fait l'objet de toute une batterie d'essais statiques. Elle est partie en République Tchèque, seul pays a disposer d'un anneau sur lequel on peu pratiquer une vitesse de 200 km/h. Elle devrait y passer six mois, avant de revenir en France faire des essais sur nos lignes à grande vitesse, très probablement sur la LGV Sud-Est vu qu'il s'agit de la première des relations sur lequel le TGV M devrait prendre du service avant les jeux olympiques de 2024 nous promet t'on.
Et vous avez-vous déjà aperçu le TGV M ? Êtes-vous déjà monté à bord ? Auquel cas vous faites partie d'un cercle très étroit de privilégiés. L'attendez-vous avec impatience, pour le photographier, pour l'emprunter ? Connaissez-vous les autres modèles actuellement en service de TGV ? Si tel n'est pas le cas, je vous renvoi à cette vidéo dans laquelle je les avais tous présentés. En attendant, je lis avec intérêt tous vos commentaires, et je vous retrouve la semaine prochaine pour partager avec vous de nouvelles découvertes ferroviaires.
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