Les CC40100

à la conquête de l'Europe

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Les CC40100 à la conquête de l'Europe

Transcription :

Les CC 40100 sont une série de locomotives qui a finalement été limitée à 10 machines côté français, et 6 côté Belge qui ont circulé quand à elles pour la SNCB sous le nom de série 18. A leur naissance, elles étaient pourtant promises à un bel avenir ayant été conçues pour partir conquérir l'Europe ferroviaire en prenant la tête de prestigieux express au départ de Paris vers l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas, on avait même imaginé à une époque où il n'existait pas encore qu'elles pourraient traverser un jour un hypothétique futur tunnel sous la manche et atteindre Londres.

Alors pourquoi ont-elles été coupées dans leur élan ? Quelle a été leur carrière ? En quoi restent-elles des locomotives remarquables ? Combien d'entre-elles ont elles été préservées et où ? Je réponds à ces questions et quelques autres encore dans ce nouvel épisode. Bonjour et bienvenue dans Aiguillages !

Si les CC 40100 sont des locomotives qui ne laissent pas indifférent, c'est d'abord à cause de leur nez cassé. Elles seront les premières à adopter cette esthétique due à l'inclinaison de leur pare-brise vers l'intérieur, que l'on doit au designer Paul Arzens et qui sera par la suite la signature de nombreux modèles de machines construites par Alsthom des années 60 aux années 80. Leur silhouette a été inspirée par la position que prennent les sprinters ou les skieurs dans leurs starting-blocks. L'idée étant d'évoquer la vitesse et le confort.

Mais ces locomotives ne se résument bien sur pas à leur esthétique, elles ont été conçues d'après un cahier des charges très ambitieux.

On attendait de ces machines qu'elles soit aptes à remorquer des trains de voyageurs de 900 tonnes à la vitesse de 160 km/h en pallier, 120 km/h dans les rampes de 5 pour mille, mais qu'elles puissent atteindre les 200 km/h en pointe en vitesse commerciale. Elles étaient appelées à prendre la succession des deux locomotives prototypes, les BB30000 exploitées par la SNCF sur le réseau nord de la France et la Belgique. Ces deux pays électrifiant progressivement leur réseau, mais en retenant des tensions différentes, 1500 volts continu et 25000 volts alternatif en France, 3000 volts continu en Belgique, la SNCF souhaitait alors se doter de locomotives électriques poly-courant capables d'assurer des express trans-frontaliers.

Les BB 30000 étaient tri-tension, les CC 40100 qui en reprenaient les solutions techniques devraient faire encore mieux et devenir quand à elles bi-courant et quadri-tension.

C'était la condition pour pouvoir accéder au territoire ferroviaire Allemand qui avait opté quand à lui pour une électrification en 15 000 volts courant alternatif. Ainsi équipées, ces locomotives auraient pu rouler pratiquement dans tous les pays d'Europe, à l'exception de ceux dont l'écartement des rails n'était pas compatible. Il avait même été envisagé que ces machines pourraient un jour traverser le tunnel sous la manche, dont on parlait déjà de la possible construction dans les années 60. Pour ce faire, leur gabarit avait été réduit pour l'adapter aux contraintes de circulation sur le réseau ferré britannique. Les CC 40100 sont restées mais pour un temps seulement les seules locomotives bi-courant et quadri-tension de la SNCF. On ne retrouvera cette caractéristique technique que beaucoup plus tard, sur certaines motrices TGV.

Alors que c'est t'il passé ?

Et bien le problème est que la complexité technique des ces engins a rendu leur mise au point très délicate. Quatre premières machines ont été construites et livrées en 1964. La Direction des Etudes de Traction Electrique de la SNCF a du leur apporter de très nombreuses modifications pour en améliorer la fiabilité avant de lancer la construction de 6 nouvelles locomotives de cette série qui seront elles mises en service entre 1969 et 1970. La Belgique de son côté se lancera dans la production de 6 locomotives construites sur le modèle des CC 40100 françaises. Elles seront baptisées série 18 et mise en service à partir de 1973 pour assurer conjointement avec la SNCF les TEE Paris-Bruxelles. La SNCB les mettra également en service sur la ligne Liège-Cologne. Pour la petite histoire, l'une des CC 40100 françaises n'a eu qu'un très courte durée de vie. Il s'agit de la 6ème de la série qui a été détruite dans une collision avec un poids lourds peu de temps après sa mise en service. Une nouvelle machine sera reconstruite en Belgique en même temps qu'étaient produites les séries 18, et reprendra le numéro 40106 que portait la motrice accidentée.
Parmi les innovations technologiques mises au point pour la conception de ces machines, elles seront les premières à remplacer leur frein à timonerie par un frein Westinghouse.
Mais pour parvenir à les exploiter correctement, il faudra renoncer à certaines performances prévues au cahier des charges de ces engins et notamment au changement de rapport qui leur permettait de cibler des vitesses de 160 ou 240 km/h. La SNCF renoncera ainsi à faire de ces locomotives les machines de vitesse dont elle espérait pouvoir disposer. Il restait à ces engins l'ambition de parcourir l'Europe en tête de grands express internationaux.

Mais pour des raisons plus politiques que techniques l'interopérabilité des réseaux n'étant pas encore une question à l'ordre du jour au niveau Européen dans les années 60/70, les CC 40100 ne mettront finalement jamais leurs bogies sur les rails des Pays-Bas ou d'Allemagne.

Elles n'obtiendront pas l'autorisation de circuler dans ces pays-là. Officiellement pour des raisons techniques. Officieusement, à l'époque les grandes entreprises nationales préféraient largement continuer à jouer dans leur propre jardin, et ne voyaient pas d'un très bon œil la circulation sur leurs réseaux ferrés d'engins de traction venus de pays voisins. De ce fait, les équipements des CC 40100, leur permettant de rouler sous une caténaire alimentée en 15000 volts alternatif seront finalement démontés, et les premières locomotives quadri-tension de la SNCF redeviendront tri-tension. Au départ de Paris-Nord, elles assureront des trains à destination de Bruxelles, Amsterdam, Liège et Cologne, dont les seules voitures feront le trajet de bout en bout. Des locomotives Allemandes ou Néerlandaises prenant le relais pour assurer la traction dans leurs pays respectifs. Ces machines seront également placées en tête de nombreux TEE, le Brabant, l'Etoile du Nord, l'Oiseau Bleu, mais assureront aussi de simples Paris-Lille ou Paris-Amiens.

Leur talon d'Achille c'était leur faible fiabilité due à leur complexité technique qui les rendait onéreuses à entretenir et les amenaient à repasser très souvent à l'atelier.

Les 40100 étaient des locomotives de type CC, c'est à dire dotées de deux fois 3 essieux. Ceux-ci reprenaient une conception désormais classique en France du bogie monomoteur à bi-réduction. Par conséquent chaque bogie ne comportait qu'un seul moteur qui était relié aux 3 essieux par une série d'engrenages comprenant une 10aine de roues dentées qu'un système complexe venait graisser. Classique, mais compliqué pour les technologies en vigueur à l'époque. Le poids de ces machines était de 107 tonnes, leur longueur de 22 mètres, un record pour une locomotive française. Les 4 premières de la série développaient une puissance de 3710 kw, contre 4480 pour les 6 suivantes. Leur vitesse maximale était de 160 ou 240 km/h pour les CC 40101 à 4, limité à 180 pour les CC 40105 à 10. En toiture elles étaient équipées de 4 pantographes adaptés aux caténaires de 8 pays européens. La France, le Luxembourg, l'Italie, les Pays-Bas, la Belgique, l'Allemagne Fédérale, l'Autriche et la Suisse. Pour pouvoir circuler sous 4 tensions différentes en courant continu ou alternatif, la machine embarquait sa propre sous-station qui lui fournissait l'alimentation électrique dont ses moteurs avaient besoin. Multipliant les composants : disjoncteurs, transformateurs, redresseurs, contacteurs, la technologie à bord était très complexe mais fut vite rendue obsolète par le développement des semi-conducteurs. Résultat, les opérations de maintenance se multipliaient sur ces locomotives. D'ailleurs on ne verra jamais les 10 machines mises en circulation simultanément. Elles finirent leur carrière entre 1992 et 1996 en cédant leur place à différents modèles de TGV dont les Thalys qui circuleront quand à eux bel et bien entre la France, la Belgique, l'Allemagne et les Pays-Bas. Les temps ayant changé.

Le 1er juin 1996 est une date qui aura marquée les esprits des passionnés : ce fut la dernière circulation d'une CC 40100 en Europe.

Le Copef, Cercle Ouest Parisien d'Etudes Ferroviaire et son homologue Belge le GTF, Groupement pour la promotion et l'exploitation touristique du Transport Ferroviaire organisèrent en effet ce jour là un voyage jusqu'aux Pays-Bas, à bord d'une très confortable rame Inox de première classe, et ce fut bien la seule fois qu'une CC 40100 fut autorisée à circuler jusqu'à Amsterdam.

Une nouvelle ère s'ouvrait alors pour les CC 40100 qui basculaient de leur statut de locomotives actives à celui d'objet du patrimoine ferroviaire.

3 CC 40100 sur les 10 produites ont ainsi été préservées. La première de la série se trouve désormais à la Cité du Train à Mulhouse, la 9ème au Centre de la Mine et du Chemin de Fer de Oignies et la dernière, la CC 41110 est préservée par le MFPN et classée monument historique. Elle assure régulièrement des trains spéciaux sur le Réseau Ferré National.

Avez-vous fait partie du dernier voyage des CC 40100 ? Les avez-vous côtoyées au cours de votre carrière ? Avez-vous emprunté ces fameuses rames inox ? Avez-vous simplement connu ces locomotives en circulation ? Comme d'habitude vous pouvez me raconter tout ça en commentaires. Cette série sur les locomotives de la SNCF se poursuit sur la chaîne Aiguillages, vous pouvez d'ailleurs me suggérer les prochains sujets que vous aimeriez que je traite et retrouver les précédentes vidéos consacrées aux engins moteurs de la SNCF dans cette playlist. Je vous laisse la consulter et vous retrouve dès lundi sur la chaîne Aiguillage Modélisme, pour parler modélisme ferroviaire, et jeudi prochain ici même pour partager avec vous mes plus récentes découvertes ferroviaires.














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